
Fabiana est née, a grandi et a vécu en Argentine. Bien que la culture française ne lui semble pas si lointaine de celle de son pays natal, son intégration en France a été, pour elle, compliquée et longue.
Si cela fait désormais presque cinq ans que Fabiana vit à Paris, au début, elle ressentait que son corps vivait encore au rythme des saisons de l’Argentine. Là-bas, l’été a lieu en janvier et l’automne au mois de mars. Les repas se font également à des horaires plus tardives de ceux de la France. Fabiana sent qu’elle manque de soleil. Pourtant, lorsqu’elle retourne en Argentine, voir sa famille, elle est également déboussolée. La première nuit de retour en Amérique du Sud, elle ressent une différence. Elle reconnaît bien son pays, mais plus la ville dans laquelle elle a vécu.
Les grands-parents de Fabiana étaient européens. Ils venaient d’Italie, d’Allemagne et de France. Âgée de huit ans, c’est en entendant sa grand-mère maternelle chanter en français, qu’elle se fascine pour cette langue. Elle a alors très envie d’apprendre cette langue pour communiquer plus facilement avec elle.
Plus tard, sa maman la poussera à apprendre l’anglais. Elle obtient alors un diplôme anglais et un diplôme de communication en espagnol. Puis, elle décide ensuite d’étudier le professorat français.
En 2001, l’Argentine sombre en pleine crise économique. Les banques des Etats-Unis sont fermées et sont parties avec les dollars des argentins. La population se met alors à faire du troc, à échanger des chaussures contre des médicaments… En une semaine, le pays compte à sa tête, cinq présidents. Durant un an et demi, Fabiana se retrouve sans travail. Elle choisit pour autant d’écrire pour un journal sans être payée, ce qui lui permet de rester active et de se sentir utile.
Lors d’une discussion, la mère d’une amie l’informe qu’elle pourrait être professeur de littérature en espagnol. Elle candidate alors, et l’école l’appelle.
Ce nouveau travail lui plait beaucoup. En effet, Fabiana a toujours étudié, et elle sent que cela fait partie de sa vie de poursuivre dans ce milieu. C’est aussi à ce moment qu’elle réalise qu’elle aimerait devenir professeur de français. Elle reprend donc ses études. Une moitié de son temps est consacrée à l’apprentissage de la langue française et une autre moitié à donner des cours en espagnol. Pour optimiser son temps, Fabiana donne ses cours de français à ses élèves mais en version espagnol. Cette expérience intellectuelle est très riche pour la jeune femme.
Après avoir suivi les cours, Fabiana fait une demande de bourse pour devenir assistant espagnol dans une école en France. Elle l’obtient et quitte son pays pour assister un professeur d’espagnol dans un lycée en Bretagne où elle reste huit mois. Elle ira ensuite à Paris rejoindre une amie qui s’y trouve. C’est une belle expérience pour Fabiana, âgée de 28 ans, qui sent qu’elle doit retournée dans son pays natal, qui connaît à ce moment une renaissance. Le socialisme gagne dans son État. Il y a alors un changement de cap et la culture prend de plus en plus d’ampleur.
Le Ministère de la Culture de Santa Fe se créé en 2007/2008. La Ministre est une ancienne professeure de théâtre de Fabiana. Elles se croisent un jour dans la rue, et c’est ainsi qu’on lui propose de travailler dans la communication. À cet instant, elle n’a pas de travail et la proposition est une véritable opportunité, d’autant qu’il y a tout à construire et que les réseaux sociaux sont encore inconnus.
Fabiana travaille durant quinze années dans le Ministère, tout en continuant d’enseigner le français deux fois par semaine dans une école d’hôtellerie / restauration. Une période intense que Fabiana ne regrette nullement.
Fabiana le sait, elle ne pourra pas évoluer au sein de ce Ministère car il lui faudrait entrer en politique et ce domaine ne lui correspond pas.
En 2013, elle constitue un lourd dossier afin de postuler à une bourse de Maison des Cultures du monde. Elle l’emporte et elle est ainsi missionnée pour trois mois à Paris pour faire du lien entre un organisme français et un établissement argentin.
Lors d’une soirée à Paris, elle rencontre un homme français, l’ami d’un ami, avec lequel le courant passe bien. Elle décide toutefois de rentrer en Argentine, tandis que lui part faire un tour du monde.
Dans ce même temps, avant de repartir, Fabiana rencontre une personne au Centre Pompidou qui lui propose d’organiser un festival hors-piste à Rosario, en Argentine. C’est avec plaisir et enthousiasme qu’elle accepte.
Une fois la mission terminée, l’homme rencontré en France, décide de venir finir son tour du monde en Argentine. Il la rejoint et lui propose de venir à Paris. Fabiana accepte de le voir au mois de mai, puisqu’elle choisit de se rendre à nouveau dans la capitale française pour voir le hors-piste qu’elle a organisé en Argentine.
Fabiana est fonctionnaire et peut quitter son travail durant trois ans, sans être payée, avec la garantie de réintégrer son poste si elle souhaite revenir. Elle s’interroge. Argentine ou France ? Elle a envie d’essayer cette histoire d’amour. En parallèle, un poste dans la communication lui est proposé à Paris.
Après avoir accepté un poste, Fabiana se sent mal. Elle pleure, elle angoisse. Au bout de deux jours de travail, elle choisit de ne jamais y retourner. Elle vit alors sa première crise migratoire. Elle a la sensation de répéter l’histoire, se retrouvant sans travail, sans moyen. Elle est prise de stress durant une quinzaine de jours. Elle a alors besoin d’être en contact avec des personnes humaines, capables de l’écouter et de la comprendre.
Fabiana adore le métier de professeur. Elle choisit alors d’envoyer des curriculums vitae dans des écoles. Elle est recrutée à Goussainville dans un établissement où les difficultés qu’elle rencontre lui sont trop compliquées à gérer. Au bout de trois mois, elle décide de partir. Elle désire retourner dans le milieu de la restauration et envoie de nouveau, des CV. C’est ainsi que l’école Ferrandi la contacte. Elle y travaille maintenant depuis quatre ans.
Si durant longtemps, Fabiana n’avait plus de repère, que sa vie était à reconstruire après quarante années passées en Argentine, aujourd’hui elle se sent enfin chez elle en France, et elle est fière de son parcours.
Merci à Fabiana pour son magnifique récit !
Vous pouvez suivre le travail d’exploratrice de Fabiana via son compte instagram : @paris.explor.adore ou encore @fabifornara